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Jour 8 : JAIPUR-AGRA |
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Dans la matinée, nous visitons de nouveau un emporium, il s’agit cette fois de tissus et de tapis. Ensuite, nous grimpons au fort d’Amber (à prononcer « amer », ce qui signifie « hauteur », mais aussi, si on le prononce comme on le lit, en anglais « ambre », couleur d’ocre du fort). Construit par le maharadjah Man Singh en 1592, commandant radjput pour Akbar, il fut ensuite agrandi par les Jai Singh, avant leur installation dans leur capitale Jaipur. Les moghols victorieux avaient bien compris que les rajputs, excellents guerriers, pourraient être très utiles dans les armées. Le maharadjah Man Singh était donc au service d’Akbar, le Moghol. Akbar, un très grand empereur moghol, (Akbar signifie « grand » en arabe, se souvenir de la prière des musulmans) a ouvert une ère nouvelle pour le Rajasthan. C’est le grand-père de Shan Jahal, dont nous verrons le Taj Mahal plus tard. Petit Rappel de la dynastie : d’abord Akbar, puis Jagmandir, puis Shah Jahan, puis Aurengzeb. On y reviendra… L’association Help in Suffering lutte contre l’utilisation des éléphants pour monter au fort, c’est certainement pourquoi nous effectuons la montée en jeeps. On sacrifiait à l’entrée de ce fort et depuis le XVI ème siècle jusqu’en 1980, chaque jour, une chèvre devant le temple de Kali. Cette pratique a depuis été interdite. La salle des audiences est magnifique, et partout on peut voir des marqueteries et des miroirs incrustés au plafond. Le zenana est la partie du bâtiment où les femmes vivaient recluses, mais il comporte un passage permettant au maharadjah de circuler où bon lui semblait, sans que personne ne le sache. (300 concubines et 12 favorites, il fallait une santé de fer !). C’est seulement après cette visite que nous nous dirigeons vers un parking à éléphants où nous pouvons « chevaucher », de manière inédite et relativement confortable, des éléphants menés par des cornacs. Nous avons eu droit à un mâle, plus massif et imposant que les autres, mais très délicat dans sa marche. Alllah est vraiment grand ! L’après midi, après un repas pris dans un restaurant perdu au milieu de la campagne, nous rejoignons la ville fantôme de Fatehpur Sikri. Fantaisie érigé par Akbar et son fils héritier Jehangir (Jagmandir), cette ville mourra peu après la fin de sa construction, faute d’eau. La baisse de la nappe phréatique, malgré tous les dispositifs imaginés pour amener l’eau dans le palais, a eu raison de la vitalité de la cité. Akbar l’avait construite en ces lieux car, désespérant d’avoir un fils, il était venu ici consulter un saint ermite, qui lui avait, avec sa bénédiction, prédit l’arrivée de trois fils. Le saint ermite, après avoir refusé tous les honneurs d’Akbar, est enterré dans un mausolée de marbre au sein du palais et de la mosquée (Jama Masjid), et, lors de notre passage, nous avons pu constater que des couples viennent encore se recueillir sur son tombeau, parsemé de roses. Peut être des couples en mal d’enfants ? Sur la porte de la victoire (porte d’entrée du palais et de la mosquée) on trouve une inscription coranique qui rappelle les paroles de Jésus « Le monde est un pont, passe dessus mais n’y établis pas ta demeure »). Prophétique pour cette ville fantôme ! Akbar avait l’imagination fertile et une forme de paresse dans les divertissements. Nous avons vu une sorte de marelle dessinée au sol, en fait quelque chose comme un jeu d’échec où Akbar jouait avec sa femme, des esclaves, ou des danseuses servant de pions vivants. En dehors de cette mosquée, nous sommes assaillis par des vendeurs de toutes sortes, la ville n’étant pas morte pour tout le monde. Nous nous sommes précipités vers notre refuge, l’autobus climatisé qui nous protégeait depuis le début de notre tour de tous nos tourmenteurs. Il n’empêche que ce site est vraiment grandiose. Nous logeons maintenant au Mughal Sheraton, et nous retrouvons nos repères dans un hôtel aménagé selon nos standards occidentaux. Nous y rejoignons nos amis et collègues du premier groupe, en décalage d’un jour avec nous. Nous y apprenons très vite que dans l’après midi, un terrible attentat a touché Jaipur : 8 bombes glissées dans des sacs, accrochées aux bicyclettes ont explosé, faisant plus de 80 morts et 200 blessés. Les médecins sont débordés, demandent l’aide du gouvernement, des dons de sang. Le terrorisme est quotidien en Inde, nous confiera, blasé notre guide. Mais nous l’avons échappé belle. Dans la matinée, nous rodions devant le palais des vents, (une immense façade rose, ajourée de multiples fenêtres), justement dans l’avenue où ont été posées les bombes, déclenchées quelques heures plus tard par des mécanismes d’horlogerie. J’ai une pensée émue pour notre pauvre conducteur de cycle rickshaw : est-il encore vivant ? Les amis et parents de France n’ont pas perçu que nous pouvions être concernés. Dans le même temps les journaux télévisés faisaient leurs une sur le cyclone birman (135 000 morts) et sur le tremblement de terre au Sichuan (plus de 50 000 morts). Mais rétrospectivement, nous nous disons que notre destin n’était pas de finir à Jaipur. Nous devenons un peu indiens nous aussi. |
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